La Disparition : est paru pour la première fois en 1969 chez Denoël. Il est difficile d'écrire quelque chose sur ce livre impressionnant, troublant, captivant à plus d'un titre. Après sa lecture, on reste là, avec devant soi un vide, un grand blanc qui est d'ailleurs la thématique du roman, l'absence et la douleur qu'elle engendre, et plus que l'absence la Disparition. Mais qu'est ce qui a disparu ? On ne sait pas, c'est un blanc qui reste là, qui remplit l'espace, peut être un signe, un signe cabalistique ou une forme, un rond pas tout à fait fini, pas tout à fait fermé, avec un trait horizontal...
Vertigineux ce roman par son rapport entre le contenant et le contenu, le style et le fond.
Anton Voyl,l'un des héros insomniaque disparait, on part à sa recherche et on découvre un clan marqué par le destin et marqué d'un signe sur l'avant bras, on ne sait pas quoi, un "zahir", une sorte de trace blanche, presque effacée, presque disparue, une forme comme un rond pas tout à fait fini avec un trait horizontal...
Et quand quelqu'un arrive presque au but, découvre qui a disparu, il meurt tragiquement et disparait à son tour.
Dévoilerons-nous le sujet ?
Oui, le rapport entre le contenant - l'histoire d'un clan maudit dont les membres disparaissent tour à tour - et le contenu - c'est à dire le style de Georges Perec- nous dévoile le sujet et l'objet: le E a disparu.
Disparu vraiment, pour de vrai,véritable exercice de style, véritable et extravagante prouesse lexicographique de Georges Perec, nous avons à faire à un roman lipogrammatique en e. Pas un seul mot, dans les quelques trois cent pages, avec un e!
Des contorsions inimaginables pour arriver à ce résultat, certes quelques locutions latines, quelques expressions anglaises et quelques raccourcis comme "un laps" (de temps a disparu) ou encore dans mon "for"(intérieur a disparu) n'enlèvent rien à la prouesse stylistique.
Georges Perec est un grand amateur d'exercices de style, outre le roman lipogrammatique (absence d'une voyelle), il a également écrit un roman qui est aussi dans son genre lipogrammatique puisqu'il s'agit,cette fois, d' un "monovocalisme" en e. (La seule voyelle utilisée dans tout ce roman est le e, aucun a, i, o ou u): "Les revenentes".
Et à propos de "VOYELLES" absentes, la première personne qui apparait dans "La Disparition" c'est:... Anton VOYL (ajouter les e)!
Enfin disons encore que Georges Perec est aussi l'auteur du plus grand palindromme existant (pas moins de 1247 mots)!
(un palindromme de lettres est un texte dont l'ordre des lettres reste le même qu'on le lise de gauche à droite ou de droite à gauche, exemple connu "Esope reste ici et se repose" ou encore "a man, a plan, a canal : Panama).
Le Grand Palindrome (cliquer)
Encore un mot pour finir, si vous avez envie de lire La Disparition, ne cherchez pas le chapitre 5, lui aussi......a disparu !